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Articles Par Mois

23 juin 2015 2 23 /06 /juin /2015 07:00
Le Simulacre de Sedefkar

Pour ceux qui se demandent ce que je deviens après un long silence sur le blog, je travaille en ce moment sur le projet de Delphes, ma compagne, qui fait une levée de fond sur kickstarter. Ce projet est lié à une de mes passions, le Jeu de Rôle – en l'occurence l'Appel de Cthulhu, adapté d'Howard Phillips Lovecraft.

Quant au projet lui-même, il s'agit d'une inquiétante sculpture en six parties qui a une certaine importance dans l'intrigue d'une célèbre campagne de Jeu de Rôle nommée Terreur sur l'Orient-Express.

Le projet est déjà un succès. Nous avons eu le soutien de Chaosium éditeur américain de l'Appel de Cthulhu, mais aussi de l'éditeur français Sans Détour, ainsi que des auteurs originaux de la campagne Terreur sur l'Orient Express.
Ben sûr il y a eu çà et là quelques grincheux pour protester qu'on ose faire une levée de fond pour un projet de ce genre, et que le jeu de rôle ne se remettra jamais de l'arrivée de kickstarter, ma bonne dame, c'était mieux avant, et puis quel scandale que les artistes osent vendre leur travail à un prix qui leur permet d'en vivre, etc.

J'ajoute que le projet que nous proposons correspond exactement à l'esprit dans lequel le crowdfunding a été inventé et qui en fait, au départ, une belle idée :

1° un projet artisanal ou créatif fait par des passionnés.

2° qui n’a aucune chance d’être financée par les circuits traditionnels parce que c’est une niche dans une niche (les rôlistes qui aiment les accessoires élaborés et détaillés).

3° qui a besoin de toucher directement un public intéressé pour avoir une chance d'exister.

Il s’agit d’un projet qui n’a pour l’instant aucun marché avéré et défriché, qu'aucun éditeur ou intermédiaire classique ne lancerait, et qui ne peut espérer exister que si ses auteurs et un public intéressé parviennent à se rencontrer directement en éliminant au maximum les intermédiaires, une idée qui est extrêmement séduisante, surtout après s'être heurté pendant des années aux intermédiaires et décisionnaires économiques divers qui bloquent les projets en France et ailleurs.

N'hésitez pas à en parler autour de vous, surtout si vous connaissez des amateurs de l'Appel de Cthulhu, il ne reste que quelques jours pour participer.

Vous pouvez voir le projet ici.

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16 avril 2008 3 16 /04 /avril /2008 13:06
Cet article fut publié dans la revue Falstaff, il y a plus de treize ans. Il était introuvable depuis longtemps, et en le relisant, j'ai eu le sentiment qu'il serait parfait pour ouvrir la rubrique JdR de mon blog.


1. L’intégrité des personnages


Si le jeu de rôle a connu une longue histoire, son mode de fonctionnement n’a pas souvent été remis en cause. Par “mode de fonctionnement”, j’entends cette charte implicite accepté par l’ensemble de la communauté des joueurs, ces règles non écrites qui déterminent les parties et que chacun s’attend à voir respecté à une table de jeu, fut-elle située à l’autre bout du monde.

Je peux vous donner une règle qui, par malheur, ne se trouve pas dans ce bushido idéal du rôliste : “Les personnes qui se trouve autour d’une table de jeu doivent chacune avoir pour but de passer ensemble un moment agréable.” (Ce qui ne signifie pas forcément que leurs personnages doivent nécessairement en passer un lui aussi). Selon moi et selon beaucoup d’entre vous, j’en suis sûr, appliquer cette règle idéale serait très certainement le meilleur moyen de réussir une partie, même si cela ne suffit pas à la rendre inoubliable.

Un corrélat à cette règle serait : “faire une bonne partie, c’est jouer avec les bonnes personnes”. En effet un joueur qui aime avant tout le combat, les jets de dés, l’action héroïque et qui déteste la “prise de tête psychologique” et les scénarios où on ne fait rien d’autre que parler, s’ennuierait profondément dans une campagne en compagnie de joueurs privilégiant l’interprétation et cherchant à comprendre à travers le jeu de rôle les ressorts fondamentaux de la nature humaine… et inversement. Il ne faut pas pour autant cloisonner les genres, il n’y a pas de solution définitive en ce domaine, mais avant une partie il me semble qu’un meneur de jeu a tout intérêt à définir ce qui fera selon lui la particularité de sa campagne (“ce sera de l’action ininterrompue pendant vingt-cinq scénarios” ou encore “mon inspiration principale, c’est le Septième Sceau de Bergman, regarde-le et dit moi après si tu veux encore jouer…”)
Cependant, certains joueurs n’ont pas pour but, semble-t-il, de faire en sorte que la partie soit une réussite pour tous ceux qui se trouvent autour de la table.

Sinon pourquoi arrive-t-il que certains fassent sortir les autres joueurs pendant trois heures tandis qu’ils expliquent au Meneur les actions de leur personnage hors de la vue des autres personnages ? Pourquoi existe-t-il des joueurs qui s’apprécient hors d’une table mais dont les personnages se haïssent dès qu’ils se rencontrent ? Pourquoi certains Meneurs se trouvent-ils dépassés lors d’une partie parce qu’ils n’avaient pas pu prévoir que certains éléments du background d’un joueur à la table nuiraient à l’intérêt de son scénario ? (“Si, regarde, c’est écrit ici : Manzoni, le Parrain de Chicago est en dette avec moi. Y a qu’à aller se réfugier chez lui et j’aimerais bien voir l’I.R.A. tenter de nous tuer dans son bunker avec trente hommes armés dans les environs”). Pourquoi certains joueurs essayent-ils systématiquement de convaincre le meneur de leur faire jouer des personnages surarmés et surentraînés au détriment du plaisir des autres, plus modestes dans leurs exigences ?

Bref, les problèmes pratiques posés par la non-acception de cette règle (peut-être un peu trop idéale) ne manquent pas.

La raison invoqué par les joueurs, souvent de bonne foi, est toujours plus ou moins la même : l’intégrité du personnage. Et bon, il faut bien dire que cela coupe court à toute discussion : “si le meneur ne voulait pas que je joue ce personnage, il lui suffisait de ne pas l’accepter lorsque j’ai donné mon background”. C’est vrai que ça paraît logique. Et par la même occasion, cela nous permet de mettre en valeur l’une des règles implicites dont nous parlions tout à l’heure, tirée du bushido non écrit du jeu de rôle : un personnage doit être intègre, à n’importe quel prix.
Cette intégrité n’est pas forcément une chose néfaste. En effet, l’intégrité d’un personnage garantit sa cohérence. Seulement, en faire une règle absolue est une source de problèmes, que ne contrebalancent pas les avantages qu’on en peut tirer.


2. L’écriture du background


La manière la plus répandue de commencer une campagne de jeu de rôle, pour un Meneur, c’est de donner un cadre à ses joueurs (qu’il s’agisse d’un jeu connu de tous ou d’un univers créé entièrement par le meneur), de choisir, si besoin est, le système approprié et enfin de demander aux joueurs de créer des personnages en les limitant sur certains points (généralement ces points sont la puissance, l’âge, ou la condition sociale).

Je trouve suspect que cette manière de faire soit si répandue : en effet, il ne me semble pas que ce soit la meilleure chose à faire dans tous les cas de figure. Par exemple, dans le cas d’un scénario déjà écrit, ce n’est peut-être pas le meilleur moyen de raccorder les personnages à l’histoire. Écrire un scénario nécessite de multiples choix (esthétiques, métaphysique, thématiques) et écrire un personnage nécessite des choix similaires. La rencontre de ses choix peut être productive mais cela peut aussi être source de frustration si les choix du Meneur et du joueur sont incompatibles.
Par exemple, imaginons qu’un joueur doive écrire un background pour une campagne XVIIème siècle : il décide que le père de son personnage a été assassiné par le Marquis de Rombière, un noble de la cour de Louis XIV. Son personnage ne rêve que de se venger, mais pour l’instant (afin d’être en accord avec le cadre défini par le Meneur qui a donné comme point de départ que tous les personnages devaient vivre à Bordeaux) il se rend à Bordeaux comme apprenti tisserand afin de subvenir aux besoin de sa pauvre mère. Le scénario commence. Il rencontre les autres joueurs dans une taverne où on leur offre à boire. Puis voile noir. Les personnages se réveillent dans un bateau en partance pour l’Amérique. Ils sont au centre d’une conspiration magique où se mêlent magie, vaudou et piraterie ; toute la campagne se passera dès lors dans les Caraïbes.

Cela est passionnant certes, mais le personnage veut toujours venger son père. Le problème, c’est qu’il n’y a pas forcément la place dans la campagne pour le noble décrit dans le background du personnage. Dès lors, que va-t-il se passer ? Eh bien, le joueur peut être de bonne humeur et décider de laisser tomber temporairement sa vengeance le temps de la campagne. Mais il sera de toutes façons déçu si, à la fin, (au cas où il ait survécu) il ne se retrouve pas confronté à l’ignoble marquis. Ce n’est pas un problème mineur : la fin d’une campagne ou d’un scénario est l’un des moments les plus importants, l’un de ceux qui permettent de lui donner un sens ; Jankélévitch fait très justement remarquer que “Boris Godounoff prend un sens tout différent selon qu’il se termine par la mort du tzar, comme Rimski-Korsakov en a décidé, ou par la mélopée de l’innocent qui pleure sur (…) la Russie et prophétise ses malheur, comme Moussorski lui-même l’avait initialement voulu”1. Or terminer une campagne pleine de soleil, d’embruns et de rhum par un meurtre sordide dans le château de Versailles n’est peut-être pas un choix esthétique judicieux.
Si le joueur est de mauvaise humeur, il peut se désintéresser de l’intrigue et décider de tout faire pour revenir par le premier bateau. Ce qui peut même être justifié si la campagne comporte des moments de calme (entre chaque scénario particulièrement). Et si le Meneur de jeu essaye de l’en empêcher pour le bien de sa campagne, le joueur peut même devenir rapidement hostile et insupportable au point que tout le monde finira par prier pour qu’effectivement il le prenne, son navire…

Bref, ce problème mineur en engendrera tellement d’autres qu’il doit être de la liberté du meneur de refuser qu’un personnage ait dans son background des motivations n’entrant pas dans le cadre de la campagne.
Cela implique soit que le Meneur écrive lui-même les backgrounds et distribue aux joueurs (pas forcément la plus mauvaise solution) soit qu’il l’écrive à deux avec le joueur (une solution de compromis qui peut donner de très bons résultats).

En fait, lorsque l’on doit commencer une campagne, il faut toujours se poser la question : quel sera le type de création de personnage la plus adaptée à ce que je veux faire et qui limitera les débordements ? Si la campagne n’est pas encore écrite et qu’elle tournera seulement autour des actions des personnages et de leurs implications, le système classique reste le plus valable. Pas dans les autres cas.


3. L’utilité du background


Il y a un malentendu. La plupart des joueurs croient qu’un background sert à déterminer le caractère d’un personnage. Ce n’est pas le cas. Le background n’est rien d’autre qu’un cadre. Un mémo. On ne doit pas en être prisonnier. C’est pourquoi dans les campagnes que je masterise, je refuse les trop longs backgrounds. Pour être un peu provocateur, je dirai que plus le background est long, moins le personnage sera intéressant à jouer et plus le personnage risque d’être opaque aux autres joueurs.

Le paradoxe, c’est que le personnage doit avoir une existence pour le joueur mais qu’il n’a pas vraiment d’existence en-dehors du cadre des parties. C’est à dire que ces actions ne nous concernent et ne sont sensibles que lorsque le personnage est en situation. La raison d’exister du personnage de jeu de rôle, c’est uniquement de vivre un ou plusieurs scénario(s). Cela signifie-t-il que tout ce qui existe en dehors du scénario sans avoir d’implication dans le scénario est superflu ? Le problème ne se pose pas pour un personnage de roman puisque toute les informations nécessaires à la compréhension du personnage se trouvent dans le roman. Tout ce qui sert à l’élaboration d’un personnage peut être utile, bien sûr, toutefois plus un background est ouvert, plus le joueur sera libre. Pour incarner un personnage, on peut se demander s’il est bien utile de connaître tout son cursus et, même, si une telle connaissance ne risque pas de devenir une gêne .

Il est évident que donner systématiquement une histoire déterminée à son personnage est une pure convention, non une nécessité absolue. Un personnage peut très bien n’être qu’un “concept”, qu’un caractère. Par exemple : “c’est un homme de cinquante ans, aux opinions conservatrice ; il aime les chats, les romans policiers et le bonzaï et il vit seul dans une grande maison victorienne, mais il est l’amant de la postière.” Ou encore : “C’est un guerrier, aussi brave devant l’ennemi qu’il est timide dans la vie. Il ne parle quasiment qu’à ses amis et quand une femme lui adresse la parole, il ne peut s’empêcher de rougir. Sa force herculéenne est connue de tous mais à cause de ce handicap, certains le croient ombrageux ou stupide. Il est souvent en proie à des phases de mélancolie durant lesquelles il boit plus que de raison.”

Avec moins que cela, on a créé des personnages universels : pensez aux héros de Sergio Leone incarné par Eastwood par exemple, que sait-on d’eux au juste ? Pourtant ne nous semblent-ils pas plus réels et cohérents que nombre de PJ croisés en partie et dont on n’a jamais rien su ?

Il vous semble peut-être qu’à partir de concept aussi simple il est difficile de construire un personnage cohérent et réaliste ? Ne perdez pas de vue que l’important, c’est de le rendre intelligible. La cohérence et le réalisme ne sont que des supports de l’intelligibilité du personnage. En revanche, un personnage trop complexe ne sera pas forcément riche lorsqu’on l’interprètera. Parce que la complexité du background une fois confrontée à la réalité du scénario peut paraître incongrue voire se transformer en incohérence.

La volonté d’interpréter un personnage n’a de sens que si on l’interprète pour le bénéfice les autres. Les autres, ce sont le Meneur de jeu et les joueurs. D’une certaine manière le bon joueur c’est celui qui interprète son personnage de la façon dont un bon Meneur de jeu masterise son scénario.

On ne va pas refaire ici le vieux débat sur le paradoxe du comédien et sur la “Méthode”, néanmoins si vous ne l’avez encore jamais fait, la prochaine fois que vous construirez un personnage, je vous conseille d’inventer son caractère, son look et sa manière d’être avant de vous intéresser à son passé. Juste pour voir.


4. De l’art de modifier un background


Pour beaucoup de joueurs, il semble impossible de faire en cours de campagne  des modifications substantielles au background de leur personnage. Encore une fois, “l’intégrité du personnage” ne permettrait pas de tels changements même dans l’intérêt d’une campagne.

Mais après tout, qu’est-ce qui rend le personnage de jeu de rôle si différent sur ce point particulier du personnage de film, de roman ou de bande dessinée ?

Il y a pourtant des cas ou les modifications sont utiles et même nécessaires. Le premier cas, c’est lorsque certains éléments du background s’avèrent un obstacle à la bonne marche d’une campagne (voir l’exemple plus haut). Si dans cet exemple, le meneur de jeu explique à son joueur en cours de scénario qu’il faut abandonner cette partie de son background, il risque fort d’être accusé de commettre un crime de lèse-personnage par le joueur horrifié. Surtout si le personnage a déjà mentionné ce fait. Dans cette hypothèse, d’ailleurs, une « amputation » pur et simple est impossible.
Bien sûr il est toujours possible d’improviser la fin du scénario. Mais cela dépend un peu du temps que le meneur a mit pour écrire. En ce qui me concerne (et c’est aussi le cas de nombreux meneurs de ma connaissance) l’écriture d’un scénario est l’affaire d’une petite centaine d’heure. C’est à dire, en comptant huit heures d’écriture par jour, douze jours de travail. Bref, je ne suis pas prêt à mettre douze jours de travail au panier juste pour un joueur qui a pris la grosse tête, même si j’aurais dû être moins distrait en lisant les backgrounds.

Il reste la solution de prendre le joueur à part, et de lui dire : “bon, il y a une semaine, tu as reçu le faire-part de décès du parrain de Chicago. Et il est peu probable que son successeur ait entendu parler de toi”. Ou encore “Bon ben, Manzoni, il a payé les études de ta sœur et il est probable qu’il ne t’aidera plus parce que lorsque celle-ci l’a appris, elle a fait un scandale dans l’une de ses réceptions.” Etc…

Il arrive parfois qu’un joueur interprète un personnage d’une façon qui ne ne corresponde pas tout à fait à l’idéal qu’il s’était fixé lors de l’écriture du background. “Tu vois mon personnage, Barko, il a participé à la bataille des monts Gladour où on s’est battu à un contre cent et il a été décoré pour son courage.” “M.J. : Bon et là vous voyez une troupe de douze orcs qui est en train de piller une ferme… Barko : Euh les gars on est seulement cinq, on devrait peut-être aller chercher la troupe dans le village à côté”.

Dans ce cas, il faut discuter (hors partie) avec le joueur de la direction qu’il a si soudainement fait prendre à son personnage et lui demander s’il est bien conscient de cette incohérence. Il se peut par exemple que son personnage soit las de risquer sa peau dans des combats désespérés et que ce changement soit totalement assumé par le joueur. Parfois le joueur peut faire preuve de mauvaise foi : “mais non, tu vois, c’est pas pareil parce que… là… oui, tu vois, quoi !”. Si la réplique est passée inaperçue des autres joueurs à cause de leurs beuglements, il est toujours possible de rétablir le cap. En revanche, si tout le monde à la table s’est mis à regarder le joueur avec des yeux ronds, on est obligé d’en tenir compte pour la suite. Alors, surtout si le joueur s’est vanté à tous les autres de sa médaille, il faut se montrer ferme : soit le personnage est devenu lâche après la bataille et il faudra l’interpréter en conséquence, soit la médaille et la bataille n’étaient en fait que des affabulations de fanfaron.

L’un des intérêts d’une longue campagne, c’est la possibilité de développer des personnages et de leur donner une existence presque réelle au bout du compte. Mais, après de nombreux scénarios, on peut craindre que les personnages ne se mettent à tourner en rond parce que les joueurs les connaissent trop bien. Alors, il faut parfois injecter un petit plus qui créera la surprise et changera suffisamment la perception que les joueurs ont de leurs “collègues” pour les sortir de la routine. Ex : “Bon tu vois Barko, ben il est marié en fait, mais sa femme a été enlevée par les tribus nomade de la plaine de Tirgl, et aux dernières nouvelles elle est devenue la favorite du chef, c’est pourquoi tu n’en parles jamais.” Si une telle modification est effectuée judicieusement, des évènements passés (jusque là imputables à une interprétation bancale) peuvent s’éclairer d’un nouveau jour. “Ah! je comprends maintenant pourquoi tu as massacré ces nomades ! Et dire que je pensais que c’était juste parce que t’étais énervé ce jour-là !”
Bref, il est essentiel de comprendre que rien n’empêche de modifier ou de faire des ajouts un background en cours d’une campagne si la nécessité s’en fait sentir.


5. La dualité joueur/personnage


Tout ce que sait un joueur n’est pas obligé d’être su par son personnage. C’est évident lorsque par exemple on joue a une époque historique comme les années 20… Il serait un peu gros qu’un personnage prédise le krach boursier de 1929 ou la IIème guerre mondiale.

Il peut être intéressant d’étendre cette dualité à d’autres pans de la connaissance. Par exemple en cours de partie. La convention actuellement est de faire sortir les autres joueurs lorsque l’un des personnage doit effectuer une action auquelle les autres n’assistent pas.

Cette convention posent de nombreux problèmes. Une fois seuls, joueurs et MJ ne voient parfois pas le temps passer, et il arrive que les autres joueurs passent ainsi plusieurs heures à attendre de pouvoir revenir dans la partie. Lorsqu’ils y revienne il leur faut faire un effort pour se concentrer, ils sont énervés et hostiles au joueur solo et au MJ, avec raison.
Le moyen le plus radical de résoudre ce problème serait de décider une fois pour toute que les joueurs, même si leurs PJ se séparent, restent à la table de jeu et ainsi peuvent assister aux actions des autres. D’une part personne ne sort vraiment de la partie mais en plus l’interprétation des personnages en solo acquiert alors un véritable sens : elle s’effectue au bénéfice des autres joueurs. Est-il particulièrement difficile pour eux de compartimenter, de faire la différence entre ce qu’ils savent et ce que leur personnage sait ? Je ne crois pas. C’est une simple question d’habitude. De plus, cela évite les longues explications sur que les personnages ont fait lorsqu’ils étaient séparés. (Explication remplacé par la phrase : bon ben je te raconte ce qui s’est passé).

Évidemment il existe des jeux (comme Ambre ou, dans une certaine mesure,, Vampire) où cette solution peut paraître inadaptée. Mais cela dépend encore de l’optique dans laquelle un joueur interprète son personnage. Si son but est avant tout de créer un être plausible, aux motivations crédibles, un être touchant parce qu’avant tout humain, ce ne devrait pas être un problème. Si le but c’est juste de vivre une aventure dont il est le héros, alors il n’y verra pas d’intérêt.

Car cette dualité ne gène en aucune façon l’identification ou l’interprétation personnage : s’identifie-t-on moins à Paul Atréide parce que l’on à l’avantage sur lui de savoir que le docteur Huey va le trahir ? Un acteur a-t-il du mal à faire ressentir aux spectateurs la jalousie d’Othello parce qu’il sait que Desdémone lui est fidèle ?

Ce concept peut même être poussé très loin : pourquoi ne pas décrire à avant une partie certains évènements qui arriveront ou risqueront d’arriver dans un scénario, pourquoi ne pas déterminer avec lui à l’avance certaines actions qui influeront sur le reste du scénario ? C’est une direction qui a été jusqu’à maintenant assez peu explorée, mais qui peut ouvrir un nouveau champs de possibilités aux meneurs de jeux et aux scénaristes aussi bien qu’aux joueurs. La place nous manque pour développer ici cet aspect des choses et nous en parlerons donc dans un article ultérieur.


Conclusion


L’important à mon avis est de ne jamais laisser l’un des joueurs dicter sa logique au détriment de l’histoire et du plaisir des autres. Le Meneur de Jeu ne doit pas pour autant se comporter en tyran ; s’il veut que ses mises aux point soient acceptées par les joueurs, il lui faut, après chaque scénario, discuter avec eux de la dernière partie de ce qui n’a pas marché et des problèmes d’interprétation ou de scénario. Il est évident que prendre quelques heures pour faire ce travail de fond peut éviter bien des déceptions. Cela permet à chacun de tout mettre en œuvre pour s’améliorer et, le cas échéant, d’éviter à temps les malentendus qui, à la longue, peuvent faire capoter une campagne.
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5 mars 2008 3 05 /03 /mars /2008 00:53
J'apprends ce soir la mort de Gary Gygax, survenue ce matin… D'habitude, je ne me sens pas obligé de réagir quand j'apprend la mort d'un artiste que j'admire ou qui a compté pour moi, parce que je n'aime pas trop les grandes déclarations de circonstance. Je préfère plutôt y penser dans mon coin. Mais pour Gygax, c'est différent. Déjà, il se trouve que je l'ai rencontré, très brièvement, au Salon des Jeux de Réflexion, pour une interview qui ne fut jamais publiée, mais qui me le révéla sous un jour assez surprenant.

Gygax est un nom quasi inconnu du grand public. C'est pourtant l'homme qui fut à l'origine, avec Dave Arneson, du jeu de rôle. Peut-être que cela ne vous dit rien. Mais c'est tout petit détail qui a changé le monde dans lequel nous vivons, même pour ceux qui ne pratiquent pas le jeu de rôle.  Car leur invention a eu une influence sur la bande dessinée, sur le cinéma, sur les jeux vidéos, d'une façon à la fois visible (L'adaptation du Seigneur des Anneaux de Peter Jackson, la série Donjon de Sfar et Trondheim, Kaamelott d'Alexandre Astier etc.) et discrète…

L'aspect le plus discret, c'est la façon dont le jeu de rôle a créé des vocations de raconteurs d'histoire ou les a cristallisées. Mais aussi peut-être la manière d'envisager les histoires elles-mêmes, l'évolution des personnages, la construction de la diégèse…

Bref, si vous aimez un tant soit peu les histoires et que vous vous êtes intéressé à ce qui a été produit depuis les années soixante-dix, le jeu de rôle a eu une influence sur ce que vous regardez ou sur ce que vous lisez, et aujourd'hui, ce mode d'expression a perdu l'un de ses pères. Je tenais juste à le dire. Et demain, j'y penserai probablement en faisant ma partie de Jeu de Rôle hebdomadaire.

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