4 juillet 2007
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10:18
Je tenterai de rester autant que possible dans les généralités et, même si vous commencez à regarder la série sur TF1, l'article qui suit peut être lu sans danger.
Ne vous y trompez pas, je trouve que Heroes est une série réussie (partiellement en tout cas) et je ne suis pas du genre à bouder mon plaisir… Pendant presque une moitié de saison, on peut même dire que la perfection n'était pas loin. Mais, quel que soit l'attachement que je peux avoir pour cette série, je suis obligé de constater que la fin de la première saison est loin de tenir toutes ses promesses.
Bien que Heroes soit inspiré des comics, sa grande influence, de l'aveu même de Tim Kring, est Lost. Cependant, contrairement à cette dernière, Heroes propose une transposition narrative très évidente, allant jusqu'à énoncer ses thèmes de façon un peu maladroite (et parfois franchement prétentieuse) par une voix off en début et fin d'épisode. Les séries sont récemment, aux USA comme en France, devenue "respectables". Alors qu'il y a quelques années encore, la série restait un genre avant tout populaire qui devait passer son propos en "contrebande" (selon l'expression attribuée à Samuel Fuller), les auteurs de séries, peut-être en recherche d'une respectabilité, tendent récemment à mettre en avant leur propos, et leurs interrogations philosophiques, parfois au détriment de leur narration, comme s'il fallait rassurer le spectateur sur l'intelligence du programme qu'il est en train de regarder.
Ce n'est d'ailleurs pas le cas de Lost, qui tient son propos fermement sans jamais tomber dans ce travers, préférant montrer et mettre en action, bref produire des émotions, qu'expliciter. Quitte à être méprisée par les intellectuels qui n'y verront qu'un feuilleton addictif, sans être en mesure de voir que Lost a une construction maîtrisée à long terme et propose une exploration de notre rapport à "l'autre". Evidemment, ce n'est pas du goût de tous les spectateurs qui voudraient voir les réponses arriver plus rapidement, mais le projet de Lost est un travail sur le long terme et devra être jugée ainsi (c'est à dire que sa réussite dépendra de sa construction globale et de la conclusion de ses fils narratifs). Lost exige donc de la patience, une exigence qui va à l'encontre de l'air du temps, alors que l'immédiateté est revendiquée et prônée par l'ensemble de la société, à une époque où la lenteur est devenu un terme péjoratif.
Pour l'instant, les réponses apportées par Lost y sont satisfaisantes, et la construction de chaque saison est maîtrisée comme rarement à la télévision (Babylone 5 et Buffy mises à part). Chaque début de saison propose une nouvelle situation, explorée pendant le reste de la saison pour culminer au dernier épisode, sans pourtant se figer dans une formule. Lost offre une forme narrative très exigeante, proche du roman d'aventure – par la puissance des situations – et une thématique cohérente – transposée avec beaucoup de soin pour n'être pas envahissante et ne pas tomber dans la narration "à message" –, qui place la série dans la directe tradition de Stevenson (avec ce même savoir-faire pour produire des images et des métaphores qui fonctionnent à plusieurs niveaux). Dire que Lost est polysémique, comme on a pu l'entendre récemment, est cependant une imbécilité : ce n'est pas la multiplicité de sens qui explique le succès de Lost mais la multiplicité de point de vue autour d'un thème central, et la capacité de varier les traitements narratifs autour de ce thème (cf. Le Meilleur des Séries 2007, où j'ai abordé de front les thèmes de Lost).
On pourrait croire ici que je digresse, mais l'esprit fonctionne par comparaison et le rapport avec Lost est pertinent…
Lorsqu'Heroes veut nous imposer son intelligence et sa prétention de traiter de grandes questions humaines à coup de burin par la voix off de Mohinder – à part cela un personnage très intéressant –, il est difficile de ne pas sourire. On peut passer sur ce petit défaut, principalement lorsque la série se concentre sur les personnages et les situations, enchaînant mystères et cliffhangers, passant adroitement d'un personnage à l'autre, liant le passé des héros par des liens qui leurs sont parfois invisibles (tiens, comme Lost…).
Evidemment, la série multiplie aussi les références aux comics, sans toutefois en abuser (le rapport avec X-Men est évident, ainsi qu'avec Watchmen), mais Heroes se veut avant tout une création télévisuelle autonome. X-Men dans les années 80-90 s'inspirait parfois du soap – pas toujours en bien – et il est normal que la télévision reprenne aujourd'hui son dû. Les influences croisées entre différents médias renforcent chacun d'entre eux... Tim Kring, concepteur de la série (Crossing Jordan, Strange Worlds), admet être à peu près inculte en matière de comics et s'est donc adjoint l'aide de Jeph Loeb (qui a travaillé longtemps pour les comics, entre autres X-Men, avant d'être scénariste à la télévision et collaborer à Smallville et surtout… Lost).
Alors certes, Heroes propose d'excellents arcs et des personnages fouillés, possédant des pouvoirs qui révèlent et complètent leur personnalité profonde. Et oui, comme il se doit aujourd'hui, la série est réflexive : deux des personnages ont un lien direct avec les comics : Hiro, qui les lit, et Isaac qui les dessine. Le pouvoir de ce dernier, peindre l'avenir, permet même de faire apparaître les comics comme l'expression d'une réalité plus vaste, auquel il est nécessaire de se référer pour comprendre notre monde (n'est-ce pas le sens même de la fiction ?). La série propose donc une réflexion sur les rapports entre fiction et réalité, tout en pointant les différences de perception entre le comics et la série (les scènes où Peter tente de recréer le sens des peintures d'Isaac en les plaçant comme des cases d'une bande dessinée et leur recréation lors de l'épisode de mid-season sont à cet égard une réussite).
Pourquoi donc, au final, et malgré toutes ces qualités, Heroes me laisse-t-elle une impression mitigée ? Tout d'abord, si Heroes s'est largement inspirée de Lost pour sa construction, la série a aussi tenté d'en "tirer les leçons". Or, le désamour du public pour Lost vient paradoxalement de l'intégrité artistique de la série : Lost n'a jamais cherché à balancer des réponses rapidement dans le seul but de séduire, préférant s'appuyer sur ses mystères pour distiller ses métaphores. La série a toujours été pensée à long terme (et maintenant que les conditions sont réunies pour qu'elle puisse être conclue, les conclusions et réponses "pour ce qu'elles valent" pourront être distillées à bon escient). En revanche, Heroes a le tort de vouloir donner au spectateur ce qu'il veut, plutôt que ce dont il a besoin, ainsi chaque question soulevée, chaque problème, trouve une réponse rapide… tellement rapide qu'à la deuxième moitié de saison, on a parfois l'impression d'assister à une fuite en avant, un jeu de combinaison où les rôles et les situations changent plus qu'ils n'évoluent, mais sans que les nouveaux éléments fassent sens dans la construction globale ou possèdent de résonance propre. Du coup, l'ambition affichée de la série finit presque par apparaître comme une pose.
Tim Kring a plus ou moins admis que s'il avait précisé les relations entre personnages dès le départ, il n'avait pas préparé ses arcs dramatiques plus d'une demi-saison à l'avance... Un peu dommage lorsque l'un des éléments saillant est la prescience d'une catastrophe imminente… dont on n'aura la conclusion qu'au dernier épisode de la saison.
Alors qu'on aurait voulu être enthousiaste, tous les défauts accumulés au cours de la saison deviennent très apparents lors des derniers épisodes de la saison 1 : des personnages isolés qui évoluent dans des univers trop différents et qui n'ont pas été pensés pour être confrontés, une thèmatique abordés de l'extérieur mais qui ne se reflètent pas dans la construction, une recherche parfois bienvenue d'originalité dans les situations mais qui finit par aboutir à des incohérences. Mais surtout, la série fait l'erreur de ne jamais prendre le temps d'explorer les situations qu'elle propose. Qu'un obstacle apparaisse et il sera écarté dans le même épisode, qu'une question soit soulevée et elle sera répondue deux ou trois épisodes plus tard. C'est aussi souvent le cas pour Prison Break et 24, mais les ambitions sont clairement différentes. Prison Break et 24 sont des séries rythmées et dont le dispositif tout entier vise à créer un suspense (ce qui en tant qu'ambition artistique est largement suffisant en soit, demandez donc à Hitchcock - qu'on essaye malgré lui d'enrôler parmi les auteurs "à message" sans tenir compte de la spécificité de son art). Heroes a une ambition plus "littéraire" (car le comics est une littérature), celle de raconter une histoire aux résonances philosophiques, mais sans toutefois se donner les moyens narratifs de cette ambition. La fin de saison est particulièrement représentative de ce travers, mais ce n'est pas la seule fois dans la série qu'une situation, en apparence bâtie avec beaucoup de soin, est reglée par une pirouette scénaristique sans rapport avec l'évolution perçue des personnages (la perte de pouvoir de Hiro, par exemple).
Oui, ce jugement est sévère, d'autant plus sévère que jusqu'à l'avant-dernier épisode, j'étais enthousiasmé par Heroes. Mais cette fin de saison montre les limites de l'ambition la série : parler de super-héros mais être respectable intellectuellement, être original mais ne pas demander trop d'effort au spectateur, et au final se montrer plus malin qu'audacieux. Tim Kring est un auteur de télévision qui a de la bouteille et qui, le premier, a eu l'idée de transposer le succès cinématographique des comics à la télévision, en le combinant (contrairement à Smallville par exemple) avec la modernité visuelle et narrative que Lost et 24 ont apporté aux séries télévisées – c'est une bonne idée mais cela ne suffit pas à faire de lui un visionnaire.
Les qualités de réalisation de Heroes et ses réelles originalités sont à l'évidence dues à une incoyable somme de talents réunie autour de Kring avec un goût certain. Mais ce qui, à long terme, détermine les qualités d'écriture d'une série provient de son show-runner. Il faudra attendre les saisons suivantes pour savoir si Tim Kring a bien l'étoffe suffisante pour être le maître d'œuvre d'une série si ambitieuse. Le succès d'audience de la première saison lui donnera certainement les moyens de mettre en œuvre sa vision. Encore faut-il qu'il en ait une… et l'on regrettera – parce qu'on aimerait pouvoir apprécier Heroes autant que Lost ou BSG – que rien ne permette pour l'instant de le dire.
Ne vous y trompez pas, je trouve que Heroes est une série réussie (partiellement en tout cas) et je ne suis pas du genre à bouder mon plaisir… Pendant presque une moitié de saison, on peut même dire que la perfection n'était pas loin. Mais, quel que soit l'attachement que je peux avoir pour cette série, je suis obligé de constater que la fin de la première saison est loin de tenir toutes ses promesses.
Bien que Heroes soit inspiré des comics, sa grande influence, de l'aveu même de Tim Kring, est Lost. Cependant, contrairement à cette dernière, Heroes propose une transposition narrative très évidente, allant jusqu'à énoncer ses thèmes de façon un peu maladroite (et parfois franchement prétentieuse) par une voix off en début et fin d'épisode. Les séries sont récemment, aux USA comme en France, devenue "respectables". Alors qu'il y a quelques années encore, la série restait un genre avant tout populaire qui devait passer son propos en "contrebande" (selon l'expression attribuée à Samuel Fuller), les auteurs de séries, peut-être en recherche d'une respectabilité, tendent récemment à mettre en avant leur propos, et leurs interrogations philosophiques, parfois au détriment de leur narration, comme s'il fallait rassurer le spectateur sur l'intelligence du programme qu'il est en train de regarder.
Ce n'est d'ailleurs pas le cas de Lost, qui tient son propos fermement sans jamais tomber dans ce travers, préférant montrer et mettre en action, bref produire des émotions, qu'expliciter. Quitte à être méprisée par les intellectuels qui n'y verront qu'un feuilleton addictif, sans être en mesure de voir que Lost a une construction maîtrisée à long terme et propose une exploration de notre rapport à "l'autre". Evidemment, ce n'est pas du goût de tous les spectateurs qui voudraient voir les réponses arriver plus rapidement, mais le projet de Lost est un travail sur le long terme et devra être jugée ainsi (c'est à dire que sa réussite dépendra de sa construction globale et de la conclusion de ses fils narratifs). Lost exige donc de la patience, une exigence qui va à l'encontre de l'air du temps, alors que l'immédiateté est revendiquée et prônée par l'ensemble de la société, à une époque où la lenteur est devenu un terme péjoratif.
Pour l'instant, les réponses apportées par Lost y sont satisfaisantes, et la construction de chaque saison est maîtrisée comme rarement à la télévision (Babylone 5 et Buffy mises à part). Chaque début de saison propose une nouvelle situation, explorée pendant le reste de la saison pour culminer au dernier épisode, sans pourtant se figer dans une formule. Lost offre une forme narrative très exigeante, proche du roman d'aventure – par la puissance des situations – et une thématique cohérente – transposée avec beaucoup de soin pour n'être pas envahissante et ne pas tomber dans la narration "à message" –, qui place la série dans la directe tradition de Stevenson (avec ce même savoir-faire pour produire des images et des métaphores qui fonctionnent à plusieurs niveaux). Dire que Lost est polysémique, comme on a pu l'entendre récemment, est cependant une imbécilité : ce n'est pas la multiplicité de sens qui explique le succès de Lost mais la multiplicité de point de vue autour d'un thème central, et la capacité de varier les traitements narratifs autour de ce thème (cf. Le Meilleur des Séries 2007, où j'ai abordé de front les thèmes de Lost).
On pourrait croire ici que je digresse, mais l'esprit fonctionne par comparaison et le rapport avec Lost est pertinent…
Lorsqu'Heroes veut nous imposer son intelligence et sa prétention de traiter de grandes questions humaines à coup de burin par la voix off de Mohinder – à part cela un personnage très intéressant –, il est difficile de ne pas sourire. On peut passer sur ce petit défaut, principalement lorsque la série se concentre sur les personnages et les situations, enchaînant mystères et cliffhangers, passant adroitement d'un personnage à l'autre, liant le passé des héros par des liens qui leurs sont parfois invisibles (tiens, comme Lost…).
Evidemment, la série multiplie aussi les références aux comics, sans toutefois en abuser (le rapport avec X-Men est évident, ainsi qu'avec Watchmen), mais Heroes se veut avant tout une création télévisuelle autonome. X-Men dans les années 80-90 s'inspirait parfois du soap – pas toujours en bien – et il est normal que la télévision reprenne aujourd'hui son dû. Les influences croisées entre différents médias renforcent chacun d'entre eux... Tim Kring, concepteur de la série (Crossing Jordan, Strange Worlds), admet être à peu près inculte en matière de comics et s'est donc adjoint l'aide de Jeph Loeb (qui a travaillé longtemps pour les comics, entre autres X-Men, avant d'être scénariste à la télévision et collaborer à Smallville et surtout… Lost).
Alors certes, Heroes propose d'excellents arcs et des personnages fouillés, possédant des pouvoirs qui révèlent et complètent leur personnalité profonde. Et oui, comme il se doit aujourd'hui, la série est réflexive : deux des personnages ont un lien direct avec les comics : Hiro, qui les lit, et Isaac qui les dessine. Le pouvoir de ce dernier, peindre l'avenir, permet même de faire apparaître les comics comme l'expression d'une réalité plus vaste, auquel il est nécessaire de se référer pour comprendre notre monde (n'est-ce pas le sens même de la fiction ?). La série propose donc une réflexion sur les rapports entre fiction et réalité, tout en pointant les différences de perception entre le comics et la série (les scènes où Peter tente de recréer le sens des peintures d'Isaac en les plaçant comme des cases d'une bande dessinée et leur recréation lors de l'épisode de mid-season sont à cet égard une réussite).
Pourquoi donc, au final, et malgré toutes ces qualités, Heroes me laisse-t-elle une impression mitigée ? Tout d'abord, si Heroes s'est largement inspirée de Lost pour sa construction, la série a aussi tenté d'en "tirer les leçons". Or, le désamour du public pour Lost vient paradoxalement de l'intégrité artistique de la série : Lost n'a jamais cherché à balancer des réponses rapidement dans le seul but de séduire, préférant s'appuyer sur ses mystères pour distiller ses métaphores. La série a toujours été pensée à long terme (et maintenant que les conditions sont réunies pour qu'elle puisse être conclue, les conclusions et réponses "pour ce qu'elles valent" pourront être distillées à bon escient). En revanche, Heroes a le tort de vouloir donner au spectateur ce qu'il veut, plutôt que ce dont il a besoin, ainsi chaque question soulevée, chaque problème, trouve une réponse rapide… tellement rapide qu'à la deuxième moitié de saison, on a parfois l'impression d'assister à une fuite en avant, un jeu de combinaison où les rôles et les situations changent plus qu'ils n'évoluent, mais sans que les nouveaux éléments fassent sens dans la construction globale ou possèdent de résonance propre. Du coup, l'ambition affichée de la série finit presque par apparaître comme une pose.
Tim Kring a plus ou moins admis que s'il avait précisé les relations entre personnages dès le départ, il n'avait pas préparé ses arcs dramatiques plus d'une demi-saison à l'avance... Un peu dommage lorsque l'un des éléments saillant est la prescience d'une catastrophe imminente… dont on n'aura la conclusion qu'au dernier épisode de la saison.
Alors qu'on aurait voulu être enthousiaste, tous les défauts accumulés au cours de la saison deviennent très apparents lors des derniers épisodes de la saison 1 : des personnages isolés qui évoluent dans des univers trop différents et qui n'ont pas été pensés pour être confrontés, une thèmatique abordés de l'extérieur mais qui ne se reflètent pas dans la construction, une recherche parfois bienvenue d'originalité dans les situations mais qui finit par aboutir à des incohérences. Mais surtout, la série fait l'erreur de ne jamais prendre le temps d'explorer les situations qu'elle propose. Qu'un obstacle apparaisse et il sera écarté dans le même épisode, qu'une question soit soulevée et elle sera répondue deux ou trois épisodes plus tard. C'est aussi souvent le cas pour Prison Break et 24, mais les ambitions sont clairement différentes. Prison Break et 24 sont des séries rythmées et dont le dispositif tout entier vise à créer un suspense (ce qui en tant qu'ambition artistique est largement suffisant en soit, demandez donc à Hitchcock - qu'on essaye malgré lui d'enrôler parmi les auteurs "à message" sans tenir compte de la spécificité de son art). Heroes a une ambition plus "littéraire" (car le comics est une littérature), celle de raconter une histoire aux résonances philosophiques, mais sans toutefois se donner les moyens narratifs de cette ambition. La fin de saison est particulièrement représentative de ce travers, mais ce n'est pas la seule fois dans la série qu'une situation, en apparence bâtie avec beaucoup de soin, est reglée par une pirouette scénaristique sans rapport avec l'évolution perçue des personnages (la perte de pouvoir de Hiro, par exemple).
Oui, ce jugement est sévère, d'autant plus sévère que jusqu'à l'avant-dernier épisode, j'étais enthousiasmé par Heroes. Mais cette fin de saison montre les limites de l'ambition la série : parler de super-héros mais être respectable intellectuellement, être original mais ne pas demander trop d'effort au spectateur, et au final se montrer plus malin qu'audacieux. Tim Kring est un auteur de télévision qui a de la bouteille et qui, le premier, a eu l'idée de transposer le succès cinématographique des comics à la télévision, en le combinant (contrairement à Smallville par exemple) avec la modernité visuelle et narrative que Lost et 24 ont apporté aux séries télévisées – c'est une bonne idée mais cela ne suffit pas à faire de lui un visionnaire.
Les qualités de réalisation de Heroes et ses réelles originalités sont à l'évidence dues à une incoyable somme de talents réunie autour de Kring avec un goût certain. Mais ce qui, à long terme, détermine les qualités d'écriture d'une série provient de son show-runner. Il faudra attendre les saisons suivantes pour savoir si Tim Kring a bien l'étoffe suffisante pour être le maître d'œuvre d'une série si ambitieuse. Le succès d'audience de la première saison lui donnera certainement les moyens de mettre en œuvre sa vision. Encore faut-il qu'il en ait une… et l'on regrettera – parce qu'on aimerait pouvoir apprécier Heroes autant que Lost ou BSG – que rien ne permette pour l'instant de le dire.